Dating n’est pas si facile : les hommes dans le monde des rencontres
Le journaliste russe Grigory Tumanov explique comment les femmes comprennent mieux la nature des choses, comment les hommes ont aussi besoin de compliments et comment recommencer à aimer les rencontres.
Je ne peux pas parler de l’expérience de dating de qui que soit excepté la mienne, donc pour comprendre où je veux en venir, je vais commencer par un avertissement. Oui, cet article traite des stéréotypes centrés sur les hommes et les rencontres. Il est de plus écrit par un homme marié deux fois qui n'utilise pas d'applications de rencontre. À 33 ans, j'ai travaillé dans plusieurs salles de rédaction et je sais comment rassembler des preuves et des données qui corroborent ou réfutent mes hypothèses. Ainsi, quand je parle des stéréotypes des hommes célibataires dans le monde des rencontres, je parle de mon propre point de vue en tant qu'ancien célibataire ayant travaillé dans le journalisme.
Cela étant dit, je pars délibérément d'un modèle de relation binaire, c'est-à-dire une rencontre entre un homme hétérosexuel et une femme hétérosexuelle, afin de parler de ma propre expérience. Je me suis marié la seconde fois l'année même où les applications de rencontre sont apparues sur le marché. Donc, bien que je n'aie pas utilisé personnellement les applications de rencontre, quand je parle aux hommes que je connais, il me semble que le passage à l’ère numérique n'a pas eu un grand impact sur l'environnement de rencontre dans lequel nous avons grandi. C'est dur pour les hommes aux applis et sites de rencontre ! Il existe un mythe selon lequel les hommes ont davantage besoin de sexe que les femmes. Ce n’est pas vrai, les hommes ne pensent seulement au sexe ! Je me souviens de mon adolescence où le sexe semblait inaccessible. J'avais l'impression de devoir me plier en quatre pour avoir le genre d'expériences que je voulais. Le sexe paraissait comme un trésor au fond d'un temple d'Indiana Jones, où vous deviez d'abord traverser des chaînes de montagnes, puis naviguer dans des couloirs tortueux, résoudre tout un tas d'énigmes, et enfin échapper au rocher tout en évitant les nazis occultistes qui vous poursuivaient. Pourquoi pensions-nous au sexe de cette façon ?
Eh bien, malheureusement, c'est comme ça qu’on nous avait appris à penser
Quand je dis "nous", cela inclut aussi les filles à qui leurs parents ont appris que le sexe est un élément de contrôle que l'on a sur un homme. En grandissant, c'était comme si les hommes n'avaient besoin que d'une chose, ce qui créait un rapport de force entre les filles et les garçons dès la puberté.
On a dit la même chose aux garçons, et du coup nous avons grandi dans un monde qui ne réfutait en rien ces illusions. Nous avons eu du mal à nous adapter à cette réalité déformée. Un autre problème auquel j'ai été confronté en grandissant, et que je vois encore chez les jeunes hommes, est de faire accepter que vous ne voulez pas tout de suite du sexe et que ce n'est pas grave - même si vous discutez sur une application qui a été inventée dans ce but précis.
D'un côté, on vous a appris qu'un homme est toujours prêt à faire l'amour. En même temps, vous avez peur d'offenser la fille à qui vous parlez en ne cherchant pas de rapport sexuel immédiat (le petit guide Pure sur la séduction peut vous aider là). Vous ne voulez pas qu'elle pense que vous la trouvez peu attirante. Même si je n'ai aucune expérience des applications de rencontre, je sais comment fonctionnent ces stéréotypes. Vous rencontrez une fille et elle s'attend à ce que vous ayez envie de faire l'amour parce que, en fait, vous êtes censé faire quoi d'autre ? Elle n'attend pas de vous que vous veniez chez elle pour discuter de politique. À ce moment-là, si vous n'en avez pas envie ou si vous êtes trop fatigué, vous pouvez marmonner une excuse et vous sentir coupable ou même avoir l'impression de devoir vous excuser de ne pas vouloir faire l'amour.
Je suis content de ne plus avoir 25 ans. J'ai 33 ans, et j'ai réussi à travailler suffisamment sur moi-même pour comprendre que ce n'est pas comme ça que le monde de rencontre fonctionne. À 15 ans, j'avais de nombreuses discussions animées avec mes amis sur le sexe et la pression liée au fait d’y avoir accès, mais combien d'hommes pensent encore de cette façon ?
Il n'y a pas si longtemps, une de mes amies m'a fait part d'une histoire vécue par l'un de ses collègues qui pourrait nous éclairer sur la gêne des hommes dans les relations amoureuses. Son ami, plutôt progressiste, se plaignait que lorsqu'il était seul avec une femme au bureau, il se mettait immédiatement à penser qu'il devrait ajuster son comportement pour flirter davantage. Et il ne s'agit même pas de la draguer ou de faire des allusions. C'était presque comme s'il devait immédiatement "basculer" de collègue à homme parce qu'on lui avait dit depuis l'enfance que les hommes prennent l’initiative. Il ne voulait pas vraiment draguer, mais il ne savait pas comment faire autrement. Dans sa tête, il craignait que sa collègue cesse de le respecter ou qu'elle se vexe et pense qu'il la juge inintéressante.
Ces idées s'accumulent donc et restent dans nos têtes, ce qui explique en partie notre approche passive en matière de rencontres. Il n'y a pas si longtemps, nous avons organisé l'événement "Smart Dating". Le concept était simple : 10 hommes, 10 femmes, 5 minutes pour parler, après 5 minutes tout le monde change de place. Un speed dating classique, mais avec une particularité : sur chaque table, il y avait des cartes avec des sujets de discussion sur les valeurs dans la vie, ce qui permettait, en 5 minutes, de mieux comprendre si la personne en face de vous correspondait ou non à vos attentes. Cet événement était pensé pour être facile, confortable et sans stress, mais il n'a pas attiré suffisamment de participants masculins, si bien que des hommes du personnel du bar où se tenait l'événement ont dû remplacer ceux qui s'étaient inscrits ou avaient acheté un billet mais n’étaient pas venus.
Il peut y avoir plusieurs raisons à cela : peut-être que certains hommes avaient honte, ou étaient gênés, peut-être que certains étaient simplement paresseux. Je suis sûr qu'un certain nombre d'hommes qui ne se sont pas présentés ont ressenti une certaine pression quant au fait de ramener quelqu'un chez eux : "Si je vais là-bas, il faudra que je reparte avec quelqu'un. Je suis un homme, donc je dois engager les choses pour du sexe, mais que se passe-t-il si j’ai juste envie d’être ami avec les femmes que je rencontre ?"
Maintenant que nous avons discuté de tout ce qui précède, parlons des compliments. Si j'essaie de complimenter une femme dans un bar, elle pourrait penser que je suis un de ces types louches qui finissent par envoyer une photo de leur bite au lieu d'un "bonjour". Et en vérité, la plupart des femmes ont certainement déjà rencontré quelqu'un comme ça et ont de bonnes raisons de se méfier. Ma question est la suivante : est-il possible de faire un compliment sincère à une fille sur le motif imprimé sur son t-shirt ? Devez-vous immédiatement commencer à lui expliquer que c'est tout ce que vous vouliez dire et qu'il n'y avait pas de sens caché derrière ce compliment ? Ensuite, vous attendez votre verre et allez voir ailleurs.
Et si elle se sent offensée ? Et si elle pense que vous êtes un idiot ? Et si... ?
Je suis sûr qu'après avoir lu ceci, des hommes (et des femmes) diront que j'exprime mes craintes personnelles d'être victime de stéréotypes, mais je parle de mon expérience vraiment personnelle de rencontre, je tiens à ajouter que nos craintes et nos complexes ne sont pas simplement le fruit de l'imagination, mais une réalité avec laquelle beaucoup se battent chaque jour, donc plus vite nous arrêterons de faire comme si de rien n’était, mieux ce sera.
En réalité, les hommes ont besoin de tout ce que les femmes recherchent chez un partenaire : un ami, une bonne conversation, des rapports sexuels satisfaisants où chacun tient compte des désirs et des besoins de l'autre.
Le truc, c’est qu'historiquement (et c'est très louable) les femmes ont dû constamment travailler pour leur émancipation et leur indépendance. Mais que faire des garçons à qui l'on a d'abord dit une chose, mais qui, dans la pratique, ont constaté qu’il en était tout autrement. C'est pour le moins déroutant. Et en plus de ça, nous, les hommes, trouvons bizarre de recevoir des compliments et avons tendance à ne pas y croire lorsque nous recevons de l'attention, car ce sont les hommes qui sont censés faire des compliments, nous sommes censés être ceux qui font le premier pas (souvent maladroit). Pour de nombreux hommes, les compliments restent exotiques et lorsque, dans un bar ou sur une application de rencontre, quelqu'un essaie de nous complimenter, nous avons parfois envie de nous retourner et de demander : "C'est à MOI que vous parlez ?". Vraiment, les rencontres, en ligne ou en réalité, sont difficiles pour les hommes.
Bien sûr, je ne parle pas pour tout le monde, et je laisse intentionnellement de côté tous les cas toxiques désagréables que nous avons tous expérimentés à un moment ou à un autre. Mais sur la base de ce que mes amis m'ont dit, et après avoir observé attentivement les autres et moi-même, je suis arrivé à une conclusion décevante : Nous, les hommes, avons vécu dans une sorte de "paradigme bidimensionnel" pendant si longtemps qu'il semble que nous ayons manqué le moment où il est devenu tridimensionnel. Alors, mesdames, ne le prenez pas personnellement lorsque nous restons à la maison pour jouer à la Playstation, lorsque nous ne comprenons rien des relations amoureuses ou lorsque nous déblatérons des absurdités lors du premier rendez-vous. Il se pourrait bien que vous nous plaisiez vraiment.
*L'article original a été écrit en russe.